Après la folie du papier de toilette, la folie des poules

Je serai honnête avec vous. Je suis une néophyte dans le domaine des poules. Loin de moi l’idée de vous écrire pour partager mon expertise, je souhaite davantage vous parler notre petite expérience personnelle dans le merveilleux monde des poules.

Nous rêvions d’avoir notre poulailler avec deux ou trois poulettes depuis que nous avons pris possession de notre maison. À l’époque, nous avions demandé au notaire de s’informer à savoir si nous pouvions avoir des poules sur notre terrain. Depuis 6 ans, nous gardions ce projet en tête sans jamais prendre le temps de le concrétiser pour plusieurs raisons. Voilà que cette année, nous avons décidé de mettre ce projet de l’avant. Même si cette décision était mûrement réfléchie, nous avons quand même connu quelques embûches, dont la fameuse pénurie de poules pondeuses en ce printemps particulier. La pandémie a amené les Québécois à se lancer dans cette aventure en très grand nombre. J’exagère à peine en mentionnant que, présentement, les gens s’arrachent autant les poules que le papier de toilette à la fin de mois de mars.

 

Voici les 5 questions essentielles à se poser avant de se procurer des poules :

 

1- Est-ce que vous avez le temps, maintenant et à long terme?

Avoir des poules vous demandera de vous en occuper tous les jours. Au-delà de récolter les œufs, de les nourrir et de leur fournir de l’eau fraîche, vous devrez nettoyer le poulailler et leur enclos, vous assurer qu’elles ne présentent pas de signes de maladie, veiller à leur sécurité, enrichir leur environnement pour les tenir occupées, etc.

Une poule pondeuse peut vivre 10 à 12 ans. Il s’agit donc d’un contrat à long terme. N’oubliez pas que si vos enfants vous promettent d’en prendre bien soin et de vous aider à faire l’entretien, il s’agit fréquemment d’une promesse éphémère. Nombreux seront ceux qui se contenteront de seulement ramasser les œufs pour vous laisser faire la sale besogne. Malgré tout, il peut s’agir d’un beau projet familial.

 

2- Légalement, est-ce que vous pouvez avoir des poules?

Avec les circonstances relatives au coronavirus qui sévit, de nombreuses municipalités du Québec ont entendu les demandes de leurs citoyens pour autoriser la garde de poules. Il est essentiel de prendre le temps de vous renseigner auprès de votre municipalité pour connaître les règles en vigueur. Nombre de poules autorisées, droit ou interdiction de posséder un coq, exigences minimales, emplacement sur le terrain, autorisation des voisins immédiats, sont tous des exemples de contraintes qui peuvent être imposées par votre ville. Prenez le temps de vous renseigner.

 

3- Avez-vous réfléchi à l’hiver?

Que ferez-vous de vos poules pendant l’hiver? Voilà une bonne question. Pour certains, la réponse est simple : elles seront réformées (abattues). Pour moi, qui m’attache beaucoup à mes animaux de compagnie et qui ne mange pas de viande, je devais prévoir un plan pour les héberger l’hiver. Un espace dans l’un de nos cabanons sera aménagé pour l’hiver afin de les garder avec nous à long terme. Ma belle-mère met ses poules en pension pour l’hiver afin de les retrouver au printemps suivant. Peut-être que vous avez envisagé de les donner, mais avez-vous déjà prévu à qui? Cette personne a-t-elle l’espace nécessaire, l’intérêt et le droit de prendre vos poules?

Bien que plusieurs options s’offrent à nous, elles peuvent devenir restreintes, car on pense à l’attachement que nous ou les enfants pouvons développer, aux soins que cela demande, aux coûts que cela peut engendrer, etc. Vaut mieux y réfléchir en amont. Plusieurs refuges craignent d’avoir des citoyens qui veulent se départir de leurs poules alors qu’ils n’ont pas les installations pour les accueillir.

 

4- Avez-vous un budget qui vous le permet?

J’ai l’impression de souvent parler d’argent dans mes articles de santé animale. Soyons honnêtes, avoir des animaux est un investissement important en temps et en argent. Les mignons petits poulaillers vendus « clé en main » ne le sont pas réellement bien souvent. Ils sont petits, fréquemment peu sécuritaires et, avec la demande, ils sont assez dispendieux cette année.

Dans notre cas, nous avons opté pour un petit poulailler préfabriqué pour cet été. Étant trop petit, nous avons fabriqué une volière pour permettre aux poules d’avoir un espace convenable. Nous avons changé les loquets pour améliorer la sécurité de ce dernier. Un grillage et des blocs de béton pour éviter les intrusions par des prédateurs ont été ajoutés. Nous nous sommes équipés en moulée, écailles d’huître, vers séchés, copeaux de bois et foin pour les pondoirs, contenants de rangement, alouette!

Si l’une d’entre elles est malade, avez-vous repéré un vétérinaire qui accepte d’examiner et traiter les poules à proximité de chez vous? Est-ce que vous avez un budget pour les soins préventifs et curatifs que pourraient nécessiter vos nouvelles amies à plumes?

 

5- Avez-vous réservé vos poules?

Je le répète, les poules pondeuses sont carrément en pénurie ce printemps. Il est très difficile de s’en procurer. Elles se vendent comme de petits pains chauds! Les prix ont explosé en réponse à cette forte demande. Une poule pondeuse de race commune (rousse/brune ou blanche Lohmann) se vend que quelques dollars en temps normal. On dit que plus de 15$ est presque de la folie alors qu’à l’heure actuelle les enchères montent parfois à 50$.

À moindre coût, il est possible de se procurer des poules de réforme. Il s’agit de poules pondeuses qui ont terminé leur service d’un à deux ans dans l’industrie, car après leur ponte devient moins régulière donc moins rentable. En temps normal, elles seraient réformées (abattues). Cette année, avec la forte demande, elles trouvent rapidement une nouvelle vie. Après l’âge de deux à trois ans, la production d’œufs diminue d’année en année pour prendre fin vers 5 à 8 ans d’âge tout dépendant de la race et des individus. C’est important à savoir si votre seul intérêt est d’avoir des œufs frais.

Les poules de races particulières qui se vendent généralement plus cher sont parfois de moins bonnes pondeuses et elles sont rarement vaccinées. Au lieu de produire environ 300 œufs par année, le compte se situera entre 150 à 200 annuellement.

Les poussins peuvent être tentants en raison de leur meilleure disponibilité et de leur bas prix. Attention! Pour certaines races, le sexage n’est pas possible avant quelques mois d’âge. Vous pourriez alors vous retrouver avec un coq. Certains vendent des œufs fécondés. Ils doivent alors être incubés avec précaution et, encore une fois, le sexe sera une surprise si vous avez la chance de les voir éclore. C’est à partir d’environ 18 semaines que les poules pondeuses vont débuter leur ponte la plupart du temps. Vous n’aurez donc pas d’œuf cet été en vous procurant des poussins actuellement.

 

Ça en fait des questions à se poser et des choses à planifier, vous ne trouvez pas? Pourtant ce n’est pas terminé, il faut aussi prendre le temps de bien se renseigner pour bien faire les choses. En plus d’avoir lu de la documentation en ligne, j’ai choisi de me procurer un livre sur le sujet. C’est fascinant tout ce que j’ai appris dans les dernières semaines. Nous avons reçu nos trois poules samedi dernier et nous apprenons encore tous les jours.

 

J’espère que cet article vous fera réfléchir avant de vous lancer dans cette belle aventure qui semble un peu trop populaire en ce moment. Si vous n’êtes pas trop pressé, à la lumière de ma petite expérience, je crois qu’il est judicieux de prendre le temps de bien vous préparer en vous informant et en construisant votre poulailler. Dans quelques mois, mon petit doigt me dit que plusieurs poules pondeuses chercheront une nouvelle famille, car certains réaliseront que ce n’est pas pour eux. J’espère faire fausse route. Peu importe, dans quelques mois, les prix seront possiblement plus raisonnables et l’offre sera possiblement meilleure.

 

 

 

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