Depuis que le coronavirus est présent au Québec, je suis beaucoup les actualités, je lis à propos de ce qui se passe dans les autres pays et je me garde à jour concernant les recommandations de mon Ordre professionnel et autres associations vétérinaires desquelles je suis membre. Les répercussions dans certains refuges d’Europe nous faisaient craindre le pire. Des animaux abandonnés en grande quantité, dont certains étaient récupérés dans des logements abandonnés par leur propriétaire hospitalisé.
Les choses peuvent changer à tout moment. Nous continuons de croire que le pire est à venir. Toutefois, nous avons connu une hausse des demandes d’adoption au Québec depuis la mi-mars. Voilà une belle surprise! Bien que certains refuges ont cessé, diminué ou modifié leurs services, les gens recherchent un nouveau compagnon en ce temps de crise. Certains éleveurs se disent submergés de demandes de gens qui voudraient un chiot ou un chaton au plus vite, car ils ont du temps. Merveilleux n’est-ce pas? Oui, mais… Il y a bien un « mais ». En tant que vétérinaire de refuge, mon souhait est que chaque animal qui se retrouve à l’adoption trouve sa famille pour la vie. On vise le « match » parfait, que le lien qui les unira sera plus fort que tout et que ce nouveau membre aura sa place bien à lui au sein de sa nouvelle famille.
Voici un aperçu des « raisons » que j’ai lues ou entendues qui ne sont pas de bonnes raisons d’adopter en ce moment:
1- « J’ai du temps pour m’en occuper. »
C’est vrai! Vous aurez le temps de lui enseigner les règles de la maison. C’est un gros événement pour l’animal de changer de milieu de vie et de devoir s’adapter à ses nouveaux humains. Il est aussi important de lui accorder des moments de répits et de repos. Il est vrai qu’avoir du temps pour son éducation à la propreté ou pour créer un lien de confiance est généralement une bonne chose. Toutefois, qu’adviendra-t-il lorsque vous serez de retour au travail? Avez-vous un horaire de travail qui vous permet de sortir pitou régulièrement? Avez-vous prévu qui s’occupera de lui lors de vos absences de longue durée? Aura-t-il la chance de vous suivre en vacances? Saviez-vous que l’une des raisons principales d’abandon en refuge est le « manque de temps »? Est-ce que votre intérêt envers votre nouveau compagnon sera toujours au rendez-vous quand vous aurez moins de temps?
2- « Ça va tenir les enfants occupés. »
Réellement? Vous pensez que pitou ou minou sera heureux d’obtenir le titre de « divertissement » pour vos enfants? Vous devrez prendre le temps d’enseigner à vos enfants à respecter leur nouveau compagnon. Un enfant ne devrait pas être laissé sans surveillance avec un animal afin d’éviter les incidents. Cette règle pourrait être plus difficile à respecter pour les parents qui travaillent de la maison. En clinique, j’avais souvent des clients qui me disaient qu’ils n’avaient pas imaginé à quel point c’était exigeant de s’occuper d’un chiot. Certains avouaient que c’était presque comme avoir un enfant de plus à s’occuper. Avez-vous la patience pour cela? Il sera aussi de votre responsabilité de prendre soin de cet animal même si les enfants vous ont juré de s’en occuper. Cette promesse souvent entendue fait rarement long feu…
3- « J’ai encore assez d’argent pour payer son adoption. »
Ça sonne très pessimiste, mais notre futur est incertain. Plusieurs ont déjà perdu leur emploi, d’autres travaillent selon un horaire réduit et une crise économique nous pend au bout du nez. Peut-être que vous avez en main le montant nécessaire pour adopter minou ou pitou, mais avez vous un fond d’urgence en cas de problème de santé? Devrez-vous prévoir sa stérilisation? Avez-vous ajouté les dépenses récurrentes (nourriture, gâteries, jouets, licence municipale, litière, toilettage, etc.) à votre budget? Pour bien planifier votre budget, n’hésitez pas à consulter les fiches d’information de l’AMVQ : Évaluation du coût d’entretien d’un animal.
D’autres points à considérer
Est-ce que vous envisagez de déménager prochainement? Malheureusement, le déménagement est une raison fréquente d’abandon en refuge. L’adoption d’un animal est un contrat à long terme. Il doit faire partie de vos plans futurs.
Nous avons tous nos petits défauts et il en est de même pour nos animaux. Êtes-vous prêts à consulter des personnes-ressources en cas de problème de comportement? Avez-vous du temps à consacrer à votre animal pour travailler avec lui?
Devenir famille d’accueil, y avez-vous pensé?
De nombreux refuges sont à la recherche de familles d’accueil. Avez-vous considéré l’option de prendre temporairement un animal à la maison? En plus de venir en aide à un animal et de donner un coup de main à un refuge, vous pourrez tester votre intérêt à ajouter un poilu à votre famille. Est-ce que cet intérêt perdure dans le temps?
Les bonnes raisons existent!
Loin de moi l’idée de vouloir décourager ceux qui avaient bien fait leurs « devoirs » et qui étaient rendus à l’étape de trouver leur nouveau compagnon. C’est super! Certains avaient déjà entamé leur réflexion à ce sujet, peut-être que vous attendiez vos vacances d’été pour accueillir l’animal tant souhaité, peut-être que vous étiez déjà sur la liste d’attente d’un éleveur éthique, peut-être que vous attendiez d’avoir un coup de cœur en regardant compulsivement les pages des refuges pour animaux, etc. Si c’est le cas, c’est parfait! Vous aurez la chance de passer peut-être plus de temps avec l’heureux élu et nous vous souhaitons une belle histoire.
Adopter un animal, c’est pour sa vie! Il est important de ne pas prendre cela à la légère. Après avoir pesé les pour et les contre, vous pourrez prendre une décision plus éclairée. Ce fut difficile pour moi d’écrire cet article, car je me réjouis toujours quand un animal quitte le refuge ou quand une personne de mon entourage vient d’accueillir un petit nouveau dans sa demeure. En contrepartie, il n’y a rien qui m’attriste plus que de voir un animal abandonné par son propriétaire par manque de temps…
Bonne réflexion!
Vous pouvez cliquer sur les photos afin de les agrandir.
*** Cet article n’est pas commandité.***
Passionnée d’animaux depuis toujours, j’ai même choisi d’en faire ma profession. Diplômée en techniques de santé animale en 2007 pour ensuite obtenir le titre de médecin vétérinaire en 2013, je suis présentement enseignante en Techniques de santé animale. J’ai aussi travaillé en cliniques privées et dans un refuge animalier. Ayant toujours mille et un projets en tête, je suis fière de maintenant pouvoir vous partager ma passion pour la santé animale et pour le monde animal en général.
Merci et bonne lecture!
Vous devez être connecté pour poster un commentaire.